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aimeduhamel 2017b


Le rêve de l'adolescent

        Mes parents étaient des émigrés du Piémont qui franchirent les Alpes pour se retrouver à Paris dans les années 1920. La moyenne montagne, à mi-chemin du col de Sestrières et de Pinerolo, dans laquelle vivaient des familles nombreuses, était trop pauvre pour offrir un avenir à tous et mes parents s'exilèrent  en France. Mon père qui avait un niveau de bachelier se retrouva garçon de café, alors que ma mère, humble montagnarde, trouva place comme "bonne" dans des familles. Dernier enfant de ce couple, je suis né en 1938 et ai vécu dans le centre de Paris, dans le quartier Saint-Paul, jusqu'au service militaire avant de m'établir dans la région grenobloise.

      C'est à 16 ans que je fis ce rêve de quitter le plat Paris pour les Alpes... J'étais alors apprenti dans un bureau d'études d'une dizaine de personnes et je trouvais la ville trop grande, avec trop de circulation, trop d'anonymat. Enfin trop éloignée de ces montagnes piémontaises dans lesquelles toutes les années je passais les vacances d'été. C'est à cet âge que,  péremptoire, je décidais que ce rêve de quitter Paris serait plus tard réalité. Sitôt mon service militaire achevé, j'irai vivre dans les Alpes, sous le même 45ème parallèle que mes ancêtres !

      Au-dessus de ma planche à dessin, le calendrier des Etablissements MERLIN GERIN ( devenu SCHNEIDER ELECTRIC ) affichait alors des belles images de la région grenobloise et notamment une photo de la Dent de Crolles,  comparable à celle qui illustre en fond discret la page d'accueil,  prise depuis ma maison dans le Grésivaudan...  Un clin d'oeil involontaire à mes rêves d'adolescent !

Une enfance contrastée

        J'ai vécu mon enfance dans ce quartier cosmopolite qui ouvre sur la rue des Rosiers dans le quatrième arrondissement. J'allais à l'école qui jouxtait la maison de Victor Hugo, Place des Vosges. Puis j'intégrais pour quatre années le Collège Arago à la Nation.
      Mon enfance fut contrastée avec un père en addiction, qui parle peu et fait régner une atmosphère pesante dans la maison.  Avec la crainte, la soumission et le rêve secret d'un autre espace inconnu. Avec le développement d'une claire résilience après l'âge de raison...

     Mon sentiment de vie difficile s'effaça petit à petit, avec une première sensation d'exister en dehors des miens, comme d'être classé premier de la classe durant les deux années du cours moyen, ou d'avoir été retenu comme soliste dans la chorale des petits chanteurs de la paroisse Saint Paul-Saint Louis. Le moi s'éveilla progressivement. Ma course au bonheur, je commençais à le découvrir, dépendait sans doute aussi de moi... Au fur et à mesure de mes petits succès, je découvrais une satisfaction nouvelle à l'existence. Je devenais quelqu'un..., puisqu'on me le signifiait, et ce fut de première importance !

     Puis je vécus un certain flottement à l'age de la pré-adolescence avec une adaptation difficile dans le monde nouveau du collège. A tout juste 13 ans, je perdis mon père et c'est, sous le regard ultra bienveillant de maman et de mes deux aînés, que je repris confiance en mon étoile...
     Un phénomène de balancier accompagna alors mon adolescence ; je passais alternativement du moi écrasé, timide et silencieux, au moi affirmé. Tout rentra petit à petit dans l'ordre à partir de mes 16 ans, mais mon caractère passionné avait du mal à se plier, le « petit bonhomme » demandait sa place... et supportait mal les petites accusations de tendance à l'orgueil qu'il entendait en sourdine ! Une morale prônant quelque humilité m'éclairera, tout comme la découverte et l'acceptation progressive de mes limites...

Une adolescence bien vivante

       J'ai ainsi quitté le collège Arago à la fin de la troisième technique, appelée royalement section Arts et Métiers, avec mon petit BEPC en poche. J'allais sur

mes quinze ans, volontairement prêt à intégrer le monde du travail.
      Ce fut alors pour moi le besoin de « réussir » le jeune homme timide. Avec du sport pour prendre un peu de muscle, avec les cours du soir pour continuer ma formation en sus de mes 42 heures d'emploi par semaine et avec l'assiduité à un groupe de jeunes d'aumônerie-patronage comme ouverture au monde extérieur. A 18 ans, je m'obligeais à l'écriture d'un roman pour me convaincre que j'étais devenu un grand garçon avec des convictions et de la discipline... Un roman vite oublié, touchant de maladresses !

      Je serai par contre plus discret sur mes premiers élans politiques que je fis au sein de l 'Alliance Jeanne d'Arc. Un parcours parmi les cathos de droite, face à la "chienlit" parlementaire. Je rectifiais plus tard ma voie trop inscrite dans une bulle isolée grâce au brassage humain que je fis à 20 ans dans le peloton de sous-officiers où je me retrouvais en novembre 1958, parmi de nombreux sursitaires majoritairement plus enclins aux discours et sympathies de gauche.

     A cette époque, j'employais facilement pour qualifier les attitudes deux mots qui n'ont plus le même droit de cité : l'humilité et surtout l'orgueil. Nous les remplaçons désormais par d'autres mots moins chargés de consonances morales. C'était, à cette époque, l'un des objectifs d'une éducation : il convenait, et cela sans état d'âme, de juguler le défaut et de développer la qualité. A la force du poignet !  J'ai bien sûr pas mal cru mais trébuché sur ce volontarisme. Des adultes m'ont ouvert les yeux. Parfois sans ménagement et je les en remercie encore. Il y a un "moi d'abord" que l'adolescent peu nuancé, ne savait pas bien voir ni dépasser tout seul...

Des étapes de vie et d'écriture

        Écrire a été tout au long de ma vie, un accompagnement à l'action, soit en la précédant avec quatre essais d'écriture non édités dont les manuscrits dorment dans un placard, soit plus tard ayant davantage vécu et mieux appris à maîtriser les mots et leur pouvoir, avec six livres édités à compte d'auteur ou avec un éditeur local.

       Le livre VALCLUSON, édité en 2005, évoque la part de pain dur de mon enfance, ma résilience, mais aussi les découvertes de ma jeunesse jusqu'à mon arrivée en 1961 à Grenoble. Là, une autre vie a commencé, j'ai de suite retrouvé du travail, bientôt rencontré Marie-Claude, ma future femme, avant de vivre une dizaine d'années à Seyssinet. En 1973, je m'établissais à mon compte en rachetant un secteur d'activité constructions tôlerie et électricité à l'entreprise dans laquelle je travaillais depuis une dizaine d'années. L'année suivante nous nous installions dans un hall de 750m2 construit selon nos plans, dans la Zone industrielle de Domène, autre banlieue Grenobloise. C'est aussi dans cette petite cité que nous vînmes habiter avec nos quatre enfants.

       Le livre 6 ans Maire à Domène édité en fin 1982, retrace une autre aventure... Celle démarrée avec un groupe d'études municipales, dans le sillage des GAM impulsés par le Maire de Grenoble, Hubert Dubedout. Cela nous mena à présenter une liste municipale à Domène en 1977 et à être élus ! Ce fut une période riche et généreuse où je dus sans cesse me partager entre famille, travail et Mairie. A l'issue de ce mandat j'indiquais aux Doménois ma difficulté à maîtriser cette sur-activité et mon souhait de passer la main comme leader dans notre équipe. Je pus poursuivre ainsi durant deux autres mandats ma présence comme adjoint dans notre majorité municipale qui se situait dans la mouvance de gauche.

     En fin 1992, le jour des Saints Innocents, fut le drame de notre vie, notre unique fils se tua en ski à Tignes. Ce fut une épreuve terrible pour sa jeune femme et toute notre famille. Sans crier gare, une partie de la banquise familiale s'était détachée irrémédiablement...

      Au printemps 95, faute d'autres candidats de notre sensibilité politique, j'acceptais de me représenter comme tête de liste, mais le vent politique avait tourné et c'est Michel Savin qui, avec son équipe, prendra la succession. Cet échec ne me sera pas cruel..., il me permettra de retrouver cette disponibilité aux miens qui m'a souvent manquée... Je prendrais définitivement du champ par rapport à toute activité politique et me consacrerai davantage à des activités plus spirituelles dans ma paroisse et au diocèse.

     En fin 95, je fis éditer en 2000 exemplaires un livret de 80 pages en vers libres DIEU Librement, qui me confirmera dans ce rôle d'apprenti écrivain. Ce texte de 12 000 mots sera comme un prélude à SOUS LE VITRAIL, ce que j'entends de lui de 30 000 mots, autre parole spirituelle sous forme de dialogues, écrite 15 ans plus tard.

      En octobre 1998 j'ai 60 ans et peux partir à la retraite. J'ai depuis quelques années laissé la gouverne de l'entreprise à Michel Crouzet, mon beau-frère et associé, qui m'avait rejoint dans l'entreprise deux ans après son démarrage. Il avait su donné à celle-ci une dimension nationale dans l'affichage électronique embarqué ( Cars, tramways et divers).

      En 2002 paraîtra le roman ELISA ou la rencontre. La naissance d'un jeune couple, sur des chemins spirituels que la littérature actuelle sert peu. Ce fut pour moi une expérience de pure création motivée par le besoin de ferrailler avec des convictions, de leur donner vie, le besoin aussi d'exister et peut-être, faut-il l'avouer de canaliser un certain ego ! Écrire un livre, un vrai !  Je m'étais d'ailleurs obligé, à la première année de ma retraite, à participer à une petite formation : une école du roman qui regroupait une dizaine d'apprentis en écriture plus ou moins dociles...

      L'écriture fut souvent pour moi création, mais aussi méditation. Une façon d'exister tout en me sentant invité à tenir ma place avec discrétion... dans sa vérité profonde, sans ostentation ni complexe inutile ! Le champ d'écriture reste toujours attaché à la recherche du sens et à ce que l'on croit plus et que l'on vit fondamentalement.

     Et la vie se poursuit toujours à Domène. Nous avons désormais pas bien loin de nous, la joie d'avoir 8 petits-enfants âgés de 17 à 34 ans .  C'est à eux que j'ai dédié en  premier ce livre "Appelé à la liberté..." dont vous trouverez la présentation dans la rubrique suivante.                                                                                                                           

Aimé Duhamel.